Ce voyage n’était pas forcément prévu, en tout cas, ma banquière ne s’en doutait pas, mais dans la vie, quelqu’un m’a dit qu’il fallait saisir sa chance. Alors, viens j’t’emmène au pays du « Tu risques de vouloir y aller aussi »…

…UNE HISTOIRE DE BONS MOMENTS…

Un boulot qui se terminait, un hiver qui s’annonçait rude, le ras-le-bol des entreprises, le « je veux voir autre chose » chantonnait en moi… Voici le timing idéal pour prévoir un voyage. Ma tête se montrait très claire, il fallait que je parte, ce n’était même pas un choix. Mais pour aller où? Je m’en irai en Australie. ‘Mais, il n’y a pas plus près non?‘ demandait la famille. ‘Non, c’est maintenant, c’est le bon moment, et ce sera l’Australie‘ répondis-je surprise mais sûre de moi, et ce, pour plusieurs raisons. La 1ère était le bon moment pour me donner le temps. La deuxième, le taux de PVT (Visa Programme-Vacances-Travail) allait être revu à la baisse et j’avais encore l’âge d’y prétendre, c’était là aussi le bon moment. La troisième, un bout de famille en Nouvelle-Calédonie allait rentrer définitivement en France l’année qui suivait, c’était donc maintenant ou jamais. La quatrième, j’avais une cousine de cœur à aller visiter depuis trop longtemps. Puis, la cinquième raison et, peut-être la meilleure, était que je me sentais enfin prête à faire ce grand voyage, seule.

…PASSE, QUAND TU NOUS TIENS…

Me voici sur les starting blocks, tout était prêt. PVT en poche, passeport prêt à recevoir un nouveau tampon, nouvel appareil photo entre les mains, me voici opérationnelle pour une nouvelle aventure, une sacrée aventure. Pas de date de retour, je ne sais tellement pas à quoi m’attendre que je ne prévois pas grand chose. Je sais juste que je vais élire résidence pour quelque temps chez elle, mon petit bout de famille, et que je rendrai visite aux cousins en Nouvelle-Calédonie. Quelques semaines avant de partir, des amis me feront une surprise… PVT en poche pour eux aussi, ils choisiront la capitale du Queensland pour débuter leur Road-trip australien, comme moi. Que demander de plus….

C’est à Brisbane que je débarquais, en plein milieu de la nuit, après 24 heures de vol. Bizarrement, la fatigue ne se faisait pas trop sentir. A chaque heure de vol, je réalisais ce que j’étais en train de faire, ce que j’étais en train d’accomplir, toute seule, et je savais que, quoi qu’il se passerait là-bas, je serai fière de moi. Après avoir récupéré ma valise, passé les douanes, je me dirigeais vers la sortie. Et je l’ai vu, elle était là, en face de moi, avec de tout petits yeux fatigués. Elle était venue me chercher en pleine nuit, et quel ne fût pas mon bonheur de la voir. Un mélange de soulagement, d’excitation et de nostalgie me pris à la gorge. Je ne l’avais pas vu depuis plus de 5 ans.

Comme ma sœur aînée, je me plais à l’appeler ma cousine de cœur, et je la soupçonne même de m’avoir, inconsciemment, transmis le virus du voyage, ironique pour une médecin. C’est grâce à elle que, petite, je réalisais qu’il n’y avait pas que la France sur cette planète. Inconnue au début, elle a passé plus d’un an avec nous, au sein de notre famille, il y a de cela plus de 20 ans. Encore qu’une enfant, je me souviens ne pas avoir compris qui elle était ni ce qu’elle venait faire chez nous. Pourquoi, alors que mon frère venait de partir pour les études, quelqu’un d’autre arrivait à la maison. Fallait-il le remplacer? Je me souviens aussi qu’au début, je ne comprenais pas ce qu’elle disait car son français était très timide. Mais, au fil des jours, elle prit une place, sa place et malgré quelques péripéties, elle devint un membre de notre famille. Elle ne resta qu’un an avec nous, puis retourna chez elle, à l’autre bout du monde, en Australie. Malgré mon âge, je compris qu’on ne la verrait plus. Elle était venue, elle était restée, puis elle était repartie. Pourquoi faire? N’était-elle pas bien chez nous? Intriguant pour une enfant… Je crois que c’est à ce moment là qu’au fond de moi, je me suis mise en tête, qu’un jour, moi aussi j’irai là-bas. Je voulais voir son monde, sa vie, ses habitudes, sa famille, ses amis, découvrir sa bulle. J’ai en mémoire qu’elle prenait beaucoup de plaisir à nous raconter des histoires sur son pays, sur cette île qu’elle aimait tant. Et je me souviens, avec mes yeux enfantins, avoir plongé dans cet univers de couleurs , de chaleur, de fleurs, d’animaux, et de paysages magnifiques. Tout ça pour vous dire que quand je la vis, là, devant moi, tout cela est remonté à la surface et j’étais tellement, tellement heureuse que ce jour tant attendu arrive enfin.

J’aime les aéroports, je les aime pour toutes ces émotions qu’il y règne, de l’au-revoir aux retrouvailles…

…FIRST STEP (1er pas)…

Après cette vague d’humidité qui m’enivra en plein mois de septembre, nous prenions la direction de la maison. Son français était quasiment intact mais je remarquais qu’elle buttait toujours sur le masculin/féminin. Elle n’avait presque pas changé. Quel bonheur d’être ici. J’ouvrais grand mes yeux et mes oreilles. Je me sentais bien, je me sentais loin, je me savais en territoire inconnu mais je me sentais en sécurité, en famille.

Tout paraissait démesuré, les voitures, les panneaux, les routes, tout s’ouvrait à nous. Même la conduite à gauche avait quelque chose d’exotique. Je découvris sa maison, typique du Queensland, dans une banlieue au sud-est de Brisbane où les habitations se fondent dans une nature luxuriante. Le tableau qui s’offrait à moi était digne d’une scène de Desperate Housewives. Chaque maison en bois, appelées des Queenslanders, la plus part sur pilotis, sont dotées de grandes baies vitrées. Le 4w4 parké devant est malheureusement utilisé pour le moindre déplacement tellement tout est si grand. Le jeune homme à vélo envoie le journal sur la pelouse tous les matins, les cacatoès se perchent sur les branches des hibiscus en fleurs et les clôtures font bon train afin d’éviter de mauvaises surprises dans les piscines. Par contre, une information capitale, pourtant nécessaire à ma survie, ne me fût pas communiquée. Concernant les araignées, je savais, mais quelle ne fut pas ma surprise quand je pris ma première douche! Un cafard d’une taille hallucinante vagabondait tranquillement sous les gouttes d’un air de dire « j’habite ici, alors va falloir t’habituer »! En France, un cafard dans une maison est plutôt synonyme de négligence propreté. Ici, c’est monnaie courante, et à croire que la taille est proportionnelle au pays d’accueil…

C’est en famille et entre amis que j’aurai le privilège d’arpenter les rues de Brisbane. Cette ville me fera tourner la tête. Malgré qu’elle soit la capitale du Queensland, elle donnera l’impression d’un grand village où tout est accessible, tout le temps. South Bank, West End, Fortitude Valley, New Farm, le CBD, tant de quartiers singuliers qui en font une ville dynamique et détendue.

Je me sentais libre, je me sentais libre et jeune, je me sentais libre, jeune et loin de tout, comme si, enfin, le monde m’ouvrait les bras.

…LE QUEENSLAND ET SES ENVIRONS…

Le Queensland, ou Shunshine State (État ensoleillé), est l’un des 6 états de l’Australie et le plus ensoleillé, ce qui lui vaut un climat tropical très apprécié, notamment par les retraités. Son nom, il le tient de La Reine Victoria qui lui rendit hommage à la suite de son indépendance d’avec l’état voisin. Bercé par la mer de Corail et l’Océan Pacifique, la beauté du paysage, la Grande barrière de corail, les Whitsundays, les Rainforests, les cascades, la richesse de sa flore, mais aussi des crocodiles, serpents, araignées, kangourous, requins, en font un territoire d’aventures prêt à être découvert avec un minimum de prudence…

Entre amis, nous emprunterons un ferry pour nous rendre sur North Stradbroke Island, à moins de 50 km de Brisbane. Cette île est un petit paradis doté d’une nature assez brute. Nous n’y passerons qu’une journée, mais « Straddie » nous en mettra plein la vue! Parfait pour un week-end détente… Nous irons jouer les explorateurs le temps d’un week-end sur Fraser Island. Entre les courses poursuites avec les marées et la chasse aux dingos, ces quelques jours seront un excellent moyen de prendre une année en plus sans s’en rendre compte… Une après-midi peut suffire à passer un très joli moment sur Moreton Island. Toujours dans les parages de Brisbane, cette petite île, dont la plus grande partie est sauvage, offre un cadre idéal pour se ressourcer et faire du snorkeling. Les habitations, en bois, dont certaines sont peintes en blanc rayées de bleu ou de rouge, lui donnent un air de petite station balnéaire un poil élégante. S’il vous faut une cure de glamour, ce n’est pas à Stanthorpe qu’il vous faut aller. Pourtant, c’est bien là que nous élirons domicile, pendant plusieurs semaines, dans l’espoir de renouveler notre Visa PVT d’un an supplémentaire en justifiant d’un travail agricole. Ce fût une expérience très intense, qui nous vaudra quelques traumatismes…

Nous irons prendre l’air lors d’un week-end familial, sur la Gold Coast, à Surfer Paradise. Cette ville est connue pour son côté naturel et paradoxalement, son côté superficiel. Un mélange qui en donne pour tous les goûts, également pour les fans de parcs à thème. Homesickness (mal du pays)? Un Festival français se déroulera au même moment. Quelque temps après, nous nous aventurerons dans le Lamington Park, à Oreilly’s Rainforest. Un paysage digne d’un conte de fée. Une route sinueuse, envahit de brume surnaturelle, des arbres centenaires, le doux chant des oiseaux résonnant au loin et une vue imprenable. Un endroit enchanteur, une Rainforest par excellence…

…L’AUSTRALIE ET SON IMMENSITÉ…

Les Australiens, un peu comme les Américains et les Canadiens, n’ont pas peur de faire des kilomètres. Que ce soit en avion ou en voiture, les distances pour circuler d’un point à un autre sont souvent surprenantes. Alors, comme j’ai voulu me fondre dans la masse, je me suis aventurée hors du Queensland pour voir ce qu’il s’y passait. Je n’ai pas relevé le nombre de kilomètres indiqués sur le compteur, sans regret!

Quel bonheur de mettre les pieds à Sydney. Pendant 1 semaine, je m’inventerai un appareil photo à la place des yeux afin de ne rien rater et surtout, de tout ramener à la maison, pour ne rien oublier. L’Opéra, le Harbour Bridge, le Darling Harbour, le Circular Quay, Bondi et ses plages, Manly et son ferry, le Royal Botanic Garden et ses musées… Cette ville a toutes les caractéristiques d’une capitale, pourtant, c’est Canberra qui détient le titre…

Je tenterai de comprendre en un jour pourquoi Melbourne détient la meilleure place en ce qui concerne les meilleures villes où vivre. Capitale artistique vantée par tout le monde, nous aurons le plaisir d’y vivre toutes les saisons en l’espace de 24heures.

Un détour intemporel sur l’île de Kangaroo Island nous offrira un changement de décor radical. Convoitée par les touristes et voyageurs voulant se procurer une dose de nature, cet endroit est, pour moi, un lieu surprenant et qui mérite le détour.

Adélaïde, avec ses airs hispaniques, a le mérite de posséder de merveilleux vignobles dans ses alentours. Son climat sec nous mettra à l’épreuve, mais cette étape nous apportera un peu de baume au cœur avec ses notes européennes.

C’est à Alice Spring que nous aurons l’honneur de faire nos premiers pas dans le Red Center. Cette ville érigée au milieu de nulle part, entourée de terre rouge et prise d’une chaleur assommante est le point de départ pour aller admirer Uluru. De son autre nom, Ayers Rock, il s’agit d’un lieu de culte pour les Aborigènes. Avec mon acolyte de route, nous reviendrons de ce périple au bout de 10 jours, lessivées mais tellement enchantées.

Et je n’aurais vu qu’une partie de ce pays, de cette île absolument gigantesque et surprenante. L’Australie. L’autre bout du monde. Cette sensation est incomparable avec n’importe quel autre voyage, n’importe quelle autre découverte. Ce vent de liberté, cette absence de passé, trop lourd peut-être à des moments, a le pouvoir de vous transporter. Mais, comme toujours, il est important de garder la tête sur les épaules et de ne pas oublier d’où l’on vient, jamais, au risque de se brûler les ailes…

…NO WORRIES, JUST RELAX…

Je me suis laissée bercer par le rythme des australiens pendant des mois, n’arrivant pas à penser au retour. Le pays a beau être coincé au bout du monde, son ouverture sur ce dernier est une belle leçon de vie. Je peux aujourd’hui mieux comprendre la motivation d’une jeune fille de 17 ans à quitter son cocon et poser ses valises pendant un an à l’autre bout du monde, en Europe, en quête d’histoires, d’aventures et d’amour. Malgré des notes plus prononcées de Royaume-Unis et d’Amérique, il est a porté de main de trouver son bonheur ici, de voyager, sans avoir besoin d’aller bien loin.

Je tirerai les leçons que j’ai envie de tirer et je garderai en mémoire ce que j’ai envie de me remémorer. Ce voyage était tellement important pour moi que je ne me formaterai à aucune règle. Je prendrai le chemin de l’aéroport en évitant de trop me questionner afin d’être sûre de monter dans l’avion. Je pars, avec le cœur lourd comme je ne l’ai jamais eu auparavant. J’aurais vécu, découvert, arpenté, sillonné, et j’aurais aimé, de tout mon cœur, d’une façon dont je ne me pensais pas capable. J’aurais apprécié les moindres heures passées à m’émerveiller de tout et n’importe quoi parce qu’au fond de moi, j’étais tout à fait consciente du moment présent. Alors voilà, c’était l’heure…

L’Australie est un pays continent. A la fois excitant et frustrant de par sa taille, pour arriver à en faire le tour, il faut du temps, et sur ce coup, il ne m’aura pas été fidèle jusqu’au bout. Je ne dirai pas que les australiens ont tout comprit, je ne porterai aucun jugement d’ailleurs parce que je n’en ai pas envie. Mais, je me sens chanceuse d’avoir vu grâce à elle, grâce à eux, d’avoir vécu sous ce soleil, qui pourtant très dangereux, est venu illuminer ces quelques mois de ma vie. Ayant réussi à adopter leur philosophie de vie durant ces quelques mois, je vais tout mettre en œuvre pour perpétuer ce lifestyle une fois de retour, alors, « No worries, just relax« …

 

Mary JANE.