Originaire de l’ouest de la France, Renaud, un quarantenaire au regard sensible raconte avec une certaine pudeur son histoire. Allez, viens, j’t’emmène…

…Tout va très vite…

Blessé et souvent incompris dans son enfance, petit à petit, Renaud se construit une carapace pour cacher sa colère et la violence qui le tourmente. Il commence sa vie d’adulte en quittant sa province pour Paris où il débute une carrière de commercial. Tout va très vite, à 24 ans il gagne bien sa vie, achète une maison avec la femme qu’il aime et devient père malgré qu’il ne se sente pas prêt.

« J’ai essayé de rentrer dans le rôle du père, mais je voyais bien que j’étais dans le rôle plutôt que dans le ressenti. Je m’occupais beaucoup de lui, mais je ne ressentais rien »

Comme la majorité d’entre nous, ce jeune papa pense qu’il a fait tout ce qu’il fallait quand il le fallait. Seulement, il est bien connu que la vie n’est pas un long fleuve tranquille. Un peu avant d’atteindre la trentaine, sa vie bascule. Il devient père célibataire malgré lui et tombe en profonde dépression. L’enfer lui déroule son tapis noir, qu’il emprunte d’un bon pas. Le burn-out est là. Perdu, désorienté, désemparé, par une situation qu’il ne voulait pas, il perd son boulot, il perd sa place, il perd sa boussole.

…La chute…

Toujours une main tendue vers l’extérieur, l’aide dont il a besoin, c’est au fond de lui-même qu’il la trouvera. La communication avec son fils Tom, s’estompe tous les jours un peu plus face à une relation fusionnelle maternelle très présente. Son fils grandit pendant que lui traverse toutes les difficultés auxquelles un homme blessé et perdu peut se heurter. Il se réfugie dans les bras de substances lui assurant des moments de répit face à l’insupportable situation. Les fantômes du passé sont là et c’est petit à petit qu’il prend conscience du poids de son histoire ainsi que de ses traumatismes. Les passer sous silence l’a presque mené jusqu’ici, au paradis perdu. Alors, il s’éloigne, il prend le large, il part travailler à l’étranger.

Dépendant affectif comme son père, il ressent au fond de lui le besoin de se confronter à lui-même. Renaud s’intéresse aux médecines alternatives et découvre tout un monde spirituel. Il multiplie les expériences, cherchant la difficulté, se cherchant lui-même… C’est alors qu’il participe à une traversée de l’Atlantique.

« C’était en 2007, Tom avait onze ans et je ne me sentais pas présent auprès de lui. J’ai prit la fuite. Pendant la traversée, j’ai pris conscience, j’ai été confronté à moi-même et ça a été compliqué, vraiment compliqué. Au retour, la communication avec Tom ne passait pas. C’était tendu, tout le temps »

Cinq ans plus tard, la situation devient compliquée. Plus les jours passaient et plus le jeune adolescent montrait des points communs avec l’adolescence de son père… Six ans plus tard, sa colère se généralise.

« Il n’y a plus de dialogue. Je vois bien que dans son regard, je suis une merde. Et ça, c’est douloureux, ça m’a vraiment fait mal. J’ai la sensation que l’on va vivre notre vie comme ça. Il y aura toujours cette distance, c’est posée, on sera toujours en conflit comme j’ai été avec mon père. Je vois bien que ça s’installe et il n’y a rien a faire. Tout ce que j’ai essayé n’a pas fonctionné »

Il entame un voyage d’un an et demi, de la France jusqu’en Sibérie en passant par la Mongolie, seul.

…Le déclic…

« À ce moment-là, il n’y a pas de hasard, mais la CPE du lycée me laisse un message sur mon téléphone. Il faut que j’intervienne auprès de Tom parce que là, on ne sait plus quoi faire »

À quinze ans, les choses peuvent aller vite, trop vite. Il doit rentrer, il doit être là. Il doit l’aider à trouver une solution avant que lui aussi ne puisse revenir sur ses pas, avant qu’il ne soit trop tard.

Durant toutes ces années, Renaud a réussi à se déconstruire. Humble, il a su se remettre en question, suffisamment afin de trouver une solution en vue d’un avenir meilleur. Conditionné par un système qui nous demande d’être identique, qui nous interdit officieusement de sortir du lot, Renaud a su réagir à temps. Les conditions difficiles dans lesquelles Tom s’enfonçait ont eu un impact sur lui, il était prêt à prendre sa place de père.

« Je vois bien que le voyage que j’ai fait tout seul, j’ai passé beaucoup beaucoup de temps tout seul et ça m’a fait du bien de passer du temps dans la nature, avec des gens qui n’ont rien. Je me dis que si ça m’a fait du bien à moi, ça va faire du bien à Tom »

…Dans les pas du fils…

De cette prise de conscience extraordinaire, va découler un projet encore plus fou. Renaud est conscient que le voyage a deux côtés non dissociables. Le côté du déplacement physique, l’extraction de sa zone de confort, puis le côté spirituel avec une prise de risque psychologique qui demande de se dévoiler à 100 pourcent.

En 2014, Tom, 17 ans, Renaud, 42 ans, s’envolent vers les montagnes du Kirghizstan pour trois mois à cheval. Une aventure humaine, une leçon de vie, un rite initiatique qui porte le nom de Dans les pas du fils. Cette œuvre autobiographique nous fait suivre à leur côté, la rencontre inattendue d’un fils vers la découverte d’un père. Un message d’espoir pour l’humanité. Un texte qui émeut, qui touche tout le monde et qui devrait donner des idées et de la force à beaucoup.

Renaud est devenu une âme habitée par la spiritualité, l’ouverture d’esprit et la sérénité. À 48 ans, il vit une seconde vie, la sienne. Celle qu’il a choisi et qui ne fait que commencer.
À travers toutes ces aventures, entouré d’amour, le père a grandit à travers les yeux du fils…

Marie B.